Billet - La nouvelle direction |27 October 2020
Alors que les clameurs, les cris de joies et les tintamarres des défilés du succès se sont calmées et que la déception, les larmes, l’amertume et les regrets s’effacent petit à petit sur le visage des partisans de la nouvelle opposition, cette page inédite de l’histoire des Seychelles commence à s’écrire dans une réalité du quotidien. Cette vie de tous les jours qu’il faudra désormais conjuguer avec un President élu de façon convaincante dans un processus démocratique qui fait la fierté du pays.
De nouveaux visages envahiront très bientôt les écrans de nos téléviseurs et de nos médias, de nouveaux discours viendront enrichir le débat public, ceux et celles qui nous dirigeaient durant 43 ans vont devoir faire preuve d’un dur apprentissage hors du pouvoir. Mais le seul fil conducteur qui mobilisera la nation sera la nature de ce parcours que le nouveau Chef de l’Etat a indiqué à la population : la nouvelle direction !
Cette nouvelle orientation a déjà de bonnes chances au départ, car elle repose sur un socle amplement solide composé d’un peuple volontaire, digne et surtout fier de son pays. Pour ceux qui observent les Seychelles depuis l’étranger et qui raisonnent en toute indépendance, ce pays reflète des valeurs que d’autres pays nous envient. Ce sont surtout ces principes, ces attitudes et ces croyances qui vont être les plus grands soutiens au President dans son cheminement dans cette nouvelle direction.
Déjà les signaux forts envoyés dès la proclamation de sa victoire donnent une indication sans équivoque de cette marche en avant du nouveau Chef de l’Etat : humble dans la victoire, les bras tendus à ses adversaires, refus du culte de la personnalité, profonde conviction dans la transparence, rejet de la facilité dans les décisions, non interférence dans le fonctionnement des institutions de surveillance de l’Etat, bref un résumé de cette nouvelle façon de gouverner.
Cette large victoire ouvre aussi un grand chantier qui offre à la fois d’immenses opportunités avec de grands défis. Il est inutile de rappeler ici le drame sanitaire et économique dans lequel nous a plongé le Covid-19. Cette bataille ne sera gagnée que par la mobilisation de toutes les compétences du pays. Devant un ennemi commun, on le sait, ce n’est que l’union des forces qui repousserait le danger. Dans notre secteur clé du tourisme, la créativité doit être le moteur de la relance pour faire face à des marchés fondamentalement transformés par la pandémie. Le monde du tourisme et du loisir n’est plus le même. C’est terminé ce temps où des délégations très couteuses peuvent aller en Europe ou ailleurs pour faire la tournée des grands ducs aux frais des contribuables. Il faudra attirer les clients de nos hôtels par des astuces pointues et surtout moins couteux.
Alors, quelles sont nos opportunités sur lesquelles nous devons nous appuyer en route vers cette nouvelle direction ? D’abord, cette campagne électorale quoique très passionnée donnerait des leçons à bien de pays voisins en matière de démocratie électorale. Ici, pas de bassesses raciales ou communales même si certains ont voulu, sans réussite nous attirer dans ce piège. Nous n’avons pas besoin d’un ‘Best Loser System’ comme chez uns de nos voisins pour plaire aux différentes communautés de notre population. Ensuite, notre radio et télévision nationale a su trouver, durant cette campagne électorale la bonne mesure pour jouer son vrai rôle de service public. C’est très réconfortant pour la liberté d’expression alors que d’autres pays voisins ont toujours des télévisions et radios d’état financées par le contribuable mais qui font la propagande des dirigeants du jour. Nous n’avons pas mis une loi bâillon sur les réseaux sociaux afin de museler notre peuple dans sa volonté de s’exprimer. Pourtant ailleurs, et les seychellois seront surpris de l’apprendre, un simple mot, une simple phrase qui ‘déplairait’ à un dirigeant ou une autre personne peut vite conduire à de fortes amendes et même à la prison. Nous n’avons pas aux Seychelles des corps religieux ou sociaux qui, comme dans certains pays voisins, font tout pour imposer leurs requêtes aux dirigeants du pays. Ici, ces mêmes corps religieux accompagnent le gouvernement dans la gestion du pays. Nous avons, a bien des égards, un volume assez important de valeurs démocratiques à partager avec nos amis de la région Océan Indien. C’est la fondation même de cette nouvelle route qui est tracée depuis hier avec ce grand virage électoral.
De son côté, la nouvelle opposition devra se réinventer après ce rappel à l’ordre par l’électorat. Elle devra apprendre à concevoir son nouveau projet économique et social, se préparer à poser des questions au lieu de les répondre, de juger les actions du gouvernement pour le plus grand bien de la nation. C’est la aussi une nouvelle direction qui est proposée aux anciens dirigeants. La démocratie offre à chacun son rôle et il faut pouvoir le jouer avec compétence et efficacité.
Aujourd’hui, le pays attend de découvrir le paysage de cette longue route qui a été empruntée depuis dimanche. Les espérances sont grandes, les attentes illimitées, les demandes très prononcées. Le President élu a pris la mesure de sa mission dès ses premières paroles en public et il s’est vite mis à l’ouvrage pour guider la nation. Après trois décennies à évoluer dans un monde politique dont il connait tous les coins et les recoins, il saura sans doute comment se servir de ce parcours pour nous mener vers cette nouvelle direction.
Richard Ramasawmy