Follow us on:

Facebook Twitter LinkedIn YouTube

Education

Entretien avec la Docteure (Dre) Marie-Reine Hoareau |21 May 2021

Entretien avec la Docteure (Dre) Marie-Reine Hoareau

La Docteure Marie Reine Hoareau

 « Les vrais enseignants sont passionnés par leur travail et ne l’abandonnent jamais »

 

La Docteure Marie-Reine Hoareau a pris sa retraite cette année de l’éducation nationale. Avec la pandémie qui a pris le devant, nous n’avons pas pu écrire sur cette grande dame Seychelloise qui a façonné plusieurs projets pour le développement de l’éducation.

De 2007-2020, elle a été la secrétaire générale de la Commission nationale seychelloise de l’UNESCO (L’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la science et la culture) en coordonnant l’action de l’UNESCO principalement pour ses secteurs éducation, culture, communication et sciences. Elle a été aussi, pendant deux ans, la secrétaire générale de la Commission nationale seychelloise de la Francophonie.

Maintenant à la retraite, elle en a toujours des idées et projets en poche et Dr. Hoareau nous a accordé quelques minutes pour en savoir plus sur elle. Bonne lecture !

 

Seychelles NATION : Qui est Dre Marie Reine Hoareau et veuillez raconter à nos lecteurs votre parcours de votre enfance à votre jeune âge ?

Dre Hoareau : Je suis née à Rivière Anglaise et suis la dixième enfant d’une famille de douze.  Autant que je me rappelle j’ai connu une enfance douce et heureuse. A l’époque, il n’y avait pas beaucoup de divertissements mais on se contentait de peu. Je me rappelle encore de notre premier gramophone, de notre premier frigidaire, de notre première voiture ‒ de grands évènements qui ont marqué ma vie d’enfant. Je jouais avec les voisins aux jeux traditionnels tels le cache-cache (kouk), les rondes, et konos (équivalent du jeu des osselets).  Le dimanche, on allait se promener jusqu’à la vieille chaussée (long pier). Contrairement à mes amies, je ne savais faire ni la couture, ni la cuisine. Par contre, j’avais  toujours  un livre en main. La lecture, c’était ma passion! J’aimais lire et même relire les mêmes livres. J’étais nulle en mathématiques (je le suis toujours) mais très forte en langues.   

 

Seychelles NATION : Parlez-nous de votre parcours éducationnel.

Dre Hoareau : J’ai fait mes études primaires et secondaires au Couvent de Regina Mundi (1957-1970) à Mont Fleuri. Ensuite j’ai poursuivi mes études de « Advanced Level » (Form 6) au Seychelles College (1971-1972) toujours à Mont Fleuri en face du Couvent. En octobre de la même année, j’ai obtenu une bourse d’études du gouvernement français pour poursuive des études universitaires en France. J’ai débuté la première année des études à Lille au nord puis je suis descendue à Paris où j’ai obtenu en 1976 ma licence de français à l’Université de la Sorbonne Nouvelle. 

En 1979, j’ai donné naissance à des filles jumelles ‒ Nicole et Catherine.

En 1993, j’ai obtenu la maîtrise en Sciences du Langage. Mention Français langue étrangère et en 1997, le DEA (Diplôme d’études approfondies) en Sciences du langage, Didactique et Sémiotique à l’Université de la Franche Comté à Besançon. Mes recherches de DEA portaient sur les expressions imagées dans le contexte trilingue seychellois.

En 2010, j’ai été admise au grade de Docteure à la suite des études de doctorat en Sciences du Langage d’abord à l’Université d’Aix en Provence puis à l’Université de la Réunion. Ma thèse était  intitulée : Langues en contact : Le cas du trilinguisme seychellois : l’anglais, le créole et le français.

 

Seychelles NATION : Parlez-nous de votre vie professionnelle?

Dre Hoareau : En 1973, j’ai débuté ma carrière dans l’enseignement comme suppléante à une école secondaire publique pour filles ‒ école de Sainte Agnès. Je n’avais aucune idée du métier d’enseignante mais j’ai fait de mon mieux. J’aimais beaucoup être dans la classe avec les élèves au point où j’étais  très triste quand je les ai quittées pour aller en France pour les études.

A mon retour aux Seychelles, j’ai été recrutée en juillet 1976 comme enseignante de français au Seychelles Collège où j’ai pu enseigner aux  garçons à différents niveaux d’études dans les classes secondaires appelées « Form » (Form 1-5). J’ai également enseigné le français aux classes mixtes de « A-Level » (de 1976 à 1980).

J’ai bien aimé mon travail au collège comme les élèves étaient adorables, motivés et respectueux.

En mars 1980, j’ai été donc affectée au Ministère de l’Education à La Bastille pour travailler sur le curriculum de français pour les cycles primaire et secondaire. J’ai accepté ce travail administratif avec beaucoup de réticence et de regret, car je voulais rester plus longtemps dans l’enseignement. Ensuite le ministère a déménagé au couvent de Regina Mundi et j’y suis restée plus de 20 ans comme responsable de la section chargée du curriculum de français. Avec le temps, ce travail m’a procuré beaucoup de satisfaction professionnelle dans la mesure où il comprenait une diversité de tâches et responsabilités entre autres ; concepteur de manuels de français,  concepteur d’examens pour les cycles primaire et secondaire, formatrice (formation continue des enseignants) et conseillère pédagogique qui comprenait des visites aux écoles publiques primaires et secondaires. 

En 1999, j’ai connu une nouvelle direction dans mon parcours professionnel quand j’ai été nommée  directrice de la coopération et formation internationale. Les activités comprenaient la gestion des affaires internationales ainsi que des bourses des étudiants inscrits dans les universités à l’étranger.  

J’ai occupé un nouveau poste de directeur de coopération technique en 2000 puis conseillère technique pour les relations internationales en 2004 où j’ai approfondi ma connaissance et acquis beaucoup d’expérience  en relations internationales.

Pendant plus de deux décennies, j’ai réalisé plusieurs projets de coopération bilatérale et multilatérale. J’ai représenté le ministère à de nombreux colloques, conférences et séminaires régionaux et internationaux dans différents domaines de l’éducation dans plusieurs pays  francophones (y compris la région de l’Océan Indien) et anglophones. Durant cette période, j’ai été la correspondante nationale de la CONFEMEN (Conférence des ministres de l’éducation ayant le français en partage), coordonnatrice de l’éducation pour l’action de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie).

 

Seychelles NATION : Quelle a été votre rôle en tant que secrétaire générale de la Commission de l'UNESCO aux Seychelles ?

Dre Hoareau : De 2007-2020, j’ai assumé la responsabilité de secrétaire générale de la Commission nationale seychelloise de l’UNESCO en coordonnant l’action  de l’UNESCO, principalement pour ses secteurs éducation, culture, communication et sciences. Je participais aux conférences générales bisannuelles de l’UNESCO et à travers son programme de participation, plusieurs institutions nationales et ministérielles ont bénéficié des fonds pour différents projets de renforcement de capacités nationales.   

En 2002, j’ai eu l’honneur d’être décorée Chevalière du Mérite National par le Président de la République française, Monsieur Jacques Chirac, pour ma  contribution à la promotion de la langue française et de la francophonie aux Seychelles. J’ai aussi participé activement aux travaux de la Commission Nationale de la Francophonie pendant plusieurs années.

Je suis membre au Komite nasyonal lalang kreol et je participe activement aux travaux de recherche sur le créole seychellois et je fais partie de l’équipe d’élaboration du dictionnaire unilingue du Kreol. Je suis aussi présidente de la Commission nationale des medias.

 

Seychelles NATION : Quels sont vos meilleurs souvenirs de votre parcours dans le secteur d’éducation ?

Dre Hoareau : Pendant plus de quatre décennies en éducation, j’ai beaucoup aimé le travail en équipe avec les enseignants de français pour les actions de formation pédagogique et aussi la promotion de la francophonie dans nos écoles.

C’était toujours un plaisir de faire des visites pédagogiques pour rencontrer les enseignants, devenus pour la plupart des amis, et leur apporter des conseils. J’aimais aussi produire des manuels de classe pour les élèves et le maître en fonction de la demande des enseignants et des intérêts des élèves. Pour ce qui concerne la coopération et relations internationales, j’ai pu établir de bonnes relations de travail avec les collègues aux Seychelles et à l’étranger. Lors de ma participation à de nombreux séminaires professionnels, conférences, stages et missions à l’étranger, j’ai été fascinée par la culture des autres ‒ une expérience formatrice et enrichissante.

 

Seychelles NATION : Quels conseils procuriez-vous aux jeunes d’aujourd’hui qui ne s’intéressent pas à l’enseignement ?

Dre Hoareau : Il est vrai que les jeunes de nos jours ne sont pas très attirés par l’enseignement. Nous pouvons comprendre qu’ils ont aujourd’hui, un plus grand choix de métiers, par rapport au passé quand l’enseignement était parmi les seuls métiers disponibles dans la société seychelloise. Il ne faudra pas cacher non plus que l’enseignement est un métier très exigeant qui demande beaucoup de courage et d’énergie. Pour devenir enseignant il faut avoir envie de pratiquer cette profession noble avec tout son cœur. On ne quitte pas ce métier pour aller ailleurs pour un meilleur salaire ou plus de confort. Les vrais enseignants sont passionnés par leur travail et ne l’abandonnent jamais.     

 

Seychelles NATION : Quels sont vont  loisirs et comment préparez-vous votre retraite ?

Dre Hoareau : En tant que chercheure, je m’intéresse beaucoup à l’usage de nos langues nationales dans notre contexte trilingue. Bien sûr je suis  passionnée (depuis ma jeunesse) par des expressions imagées dans nos trois langues. J’aime beaucoup faire la pâtisserie, regarder la télévision (actualités, documentaires et films) et lire tout ce qui est à portée de la main. Je suis sur Whatsapp (mais pas sur Facebook) pour rester toujours en contact avec la famille et les amis.  

Après 44 ans au Ministère de l’Education, la retraite représente une nouvelle vie pour moi. J’ai beaucoup à faire et j’ai plus de temps à consacrer à mes petits-enfants et à mes loisirs. 

 

Entretien réalisé par Vidya Gappy

 

 

 

 

 

More news