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Message de Monseigneur Alain Harel, Evêque de Port-Victoria, à l’occasion de la Fête des travailleurs, le 1er mai 2021 « Le travail est une vocation » |30 April 2021

« Alors que le monde entier, depuis plus d’un an, subit les vents contraires d’un cyclone violent nommé Covid-19, avec toutes les conséquences sanitaires, économiques, éducatives, sociales que nous connaissons, nous sommes, en ce 1er mai, invités à réfléchir sur le travail et à prier pour les travailleurs.

« Certes, même si la République des Seychelles semble vivre une certaine accalmie avec la reprise des activités économiques – entre autres le tourisme – nous réalisons néanmoins à quel point nous vivons une période de grande incertitude car, avec la mondialisation, tout est lié. Ce serait une grande illusion de penser que notre archipel serait à l’abri de cette crise mondiale. Soyons conscients de notre vulnérabilité, y compris dans le secteur de l’emploi.

« Pour nous guider dans cette réflexion concernant le travail et nous inspirer dans nos actions, nous avons à notre disposition un grand trésor en la ‘Doctrine Sociale de l’Église’.

« Ce matin, je voudrais faire référence particulièrement à une lettre encyclique du Pape Jean XXIII : ‘Pacem in terris’. Comme son titre l’indique, pour faire advenir ‘la paix sur la terre’, il nous faut œuvrer, nous dit-il, pour la promotion des ‘droits et devoirs’ de la personne humaine. Le travail étant est un de ces droits fondamentaux.

« En effet, tout adulte a un droit fondamental au travail. La société – le gouvernement, les acteurs économiques mais aussi le système éducatif entre autres – a un devoir de donner l’opportunité à chaque adulte d’exercer ce droit au travail. Au cas où la société ne peut honorer ce droit, toute démocratie digne de ce nom, met en œuvre des mécanismes de solidarité envers les chômeurs, entre autres à travers les aides sociales.

« Pourquoi est-ce que le travail est un droit fondamental au même titre que, par exemple la liberté de conscience, d’expression ou de vote ?

« Tout d’abord, par le travail, l’adulte est capable d’acquérir une autonomie pour se nourrir, se vêtir, se loger, ainsi que pour sa famille. Il accède ainsi, par le fruit de son travail, aux loisirs, à la culture etc. « Cette autonomie est source d’une saine ‘fierté’ et de dignité.

« Par ailleurs, par le travail nous participons et nous contribuons à la vie en société. Le travail nous socialise en nous mettant en lien avec d’autres personnes. Nous ne sommes pas passifs mais les acteurs de notre devenir. Nous sommes utiles, nous apportons notre contribution, et ceci est aussi source de dignité. En cette pandémie, nous avons été surpris comment des métiers, pas toujours les mieux considérés et rémunérés, ont démontré leur grande utilité pour le bien de tous. Il s’agit des ‘front-liners’. En effet, une personne travaillant dans les services de voirie est, pour le moins, autant importante pour la vie en commun qu’un trader de Wall Street !

« On raconte qu’au milieu des années 1960, lors d’une visite à la Nasa, l’agence spatiale américaine, le président des États-Unis John Fitzgerald Kennedy rencontra un agent d’entretien qui passait la serpillière dans la salle de contrôle de la mission Apollo. « Que faites-vous là ? », l’interrogea-t-il, intrigué. « J’envoie une fusée sur la lune », lui répondit l’homme avec malice. » (Journal La Croix du 24 avril 2021)

« Cette anecdote, qui ne manque pas d’humour, devrait nous interroger sur la question du salaire juste. Un salaire non pas en fonction du prestige du métier mais aussi de son utilité pour la société. Lié à cette question de justice sociale, nous découvrons alors un autre droit fondamental des travailleurs : celui de se regrouper au sein des syndicats et autres associations pour défendre leurs droits, c’est-à-dire un salaire juste, la reconnaissance et la valorisation de leur métier, ainsi qu’une part de responsabilité dans l’entreprise (le principe de subsidiarité), car le travailleur ne peut être considéré comme un simple exécutant !

« Nous n’avons qu’à visionner un film de Charlie Chaplin sur le travail à la chaîne, qui est une critique acerbe du taylorisme, pour comprendre comment certaines organisations du travail peuvent être aliénantes. J’encourage les travailleurs chrétiens des différentes paroisses du diocèse de s’engager au sein des mouvements de travailleurs chrétiens (l’Action Catholique) et ainsi fortifier leur engagement pour que leur foi soit active au sein des organisations ouvrières. Je demande aux prêtres et au diacre de les encourager dans cette démarche de foi.

« Pour nous croyants, le travail est une vocation. En effet, Dieu ne nous a pas créés comme des robots avec intelligence artificielle mais comme des personnes douées d’intelligence, de créativité, de sens de fraternité et de solidarité. Il nous confie, comme nous le dit le livre de la Genèse, (2, vs 15) la responsabilité suivante : « Le Seigneur Dieu prit l’homme l’établit dans le jardin d’Éden pour cultiver le sol et le garder ». Dans le premier chapitre de la Genèse, il est même question que les humains doivent dominer la terre. Cela nous rappelle que le travail a une dimension de lutte, de persévérance nécessaire, de pénibilité. Nous sommes donc invités, par le travail, non pas à saccager la terre, mais à maîtriser les éléments et ainsi construire la ‘maison commune’, c’est à dire une vie digne pour chaque famille.

« ‘Pacem in terris’ nous parle des droits mais aussi des devoirs de la personne humaine. En ce premier mai, fête du Travail, réfléchissions également aux devoirs de tout travailleur et des travailleurs.

Saint Paul, avec toute sa fougue, nous met en garde. Il nous dit : « Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus (épître aux Thessaloniciens, chapitre 3, verset 10.) Ainsi, apporter sa contribution au bien commun par le travail est un devoir pour tout adulte, sauf en cas d’empêchement majeur comme la maladie ou évidement après sa retraite.

« En cette année où le diocèse nous invite à prendre soin de notre famille, il est bon de nous rappeler que, dans le plan de Dieu, le salaire, fruit de notre travail, est destiné au bien de la famille, la famille étant la base même de toute société, et non pas à le gaspiller dans une consommation excessive d’alcool, ou encore à sacrifier notre salaire sur l’autel des temples modernes qui ont pour nom : les casinos.

« Par ailleurs, tout travailleur, par sa conscience professionnelle, c’est-à-dire par son sens de la responsabilité, par son souci du travail bien fait, est invité à développer ses talents et ainsi œuvrer au bien commun. Il n’est pas juste que certaines personnes, profitant de la stabilité liée à leur condition emploi, attendent passivement la fin de la journée ou du mois, pour avoir leur salaire tout en faisant le minimum! « N’oublions pas qu’il s’agit de l’argent des contribuables.

« Il n’est pas normal non plus que certaines personnes profitant de leur situation, obtiennent des profits malhonnêtes par la corruption, la mauvaise gouvernance, les conflits d’intérêts, par le vol ou d’autres moyens malhonnêtes. Par de telles manières de faire, ils blessent le corps social tout en se déshumanisent.

« Si le Seigneur nous invite à cultiver la terre il nous invite également à en prendre soin. Travailler consciencieusement, donner le meilleur de nous-même, est ainsi un devoir qui nous permet de prendre soin de notre maison commune pour parler comme le Pape François dans sa Lettre Encyclique « Laudato Si ».

« En cette Année de la Famille – Pti lepa, Pti lepa – le Pape François nous propose St Joseph comme modèle.

« En dépoussiérant l’image ‘pieuse’ de St Joseph, nous découvrons un homme : un charpentier, un homme de parole, un homme qui a su assumer ses responsabilités et ainsi collaborer à la mission que Dieu a confiée à Jésus, en transmettant au fils de Dieu un savoir-faire ‒ le travail du bois, un savoir-vivre en société. Que Joseph de Nazareth soit un modèle pour les travailleurs de notre temps.

 

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