Mon hommage au Président Mancham |12 January 2017
J’ai connu Sir James Mancham, ou ‘Ton Jim’ comme j’ai pris l’habitude de l’appeler, dès petit, en l’entendant parler à la radio et surtout de ses photos qui ornaient la maison. Ma mère prit le temps de m’expliquer ce qu’il était, avant que j’eus la surprise de le connaître personnellement quand un beau jour, dans sa Rolls Royce décapotable, il vint rendre visite à mes parents. Ce qui me surprend encore quand j’y repense aujourd’hui, c’est qu’il rendait également visite à des voisins sympathisants de M. Albert René, son adversaire politique de l’époque. Dans le voisinage, on l’appela alors aussi ‘Papa La barbe’.
Malgré mon très jeune âge, je développais une affinité pour le président Mancham, que le coup d’état du 5 juin 1977 me rendit dépressif pendant plusieurs jours. Malgré le couvre feu, mon père prit le risque de me transporter à la Clinique d’Anse Royale. Pendant ses 15 années d’exil en Angleterre, un des rares contacts que nous ayons avec lui fut une cassette vidéo qu’il nous envoya un jour. Toute la famille ainsi que des voisins se rassemblèrent alors dans le salon pour revoir le fameux visage barbu, portant malgré sa mélancolie évidente, toujours un large sourire.
En 1992, j’eus le privilège d’être parmi les premiers Seychellois à rencontrer M. Mancham avant son retour d’exil le 12 avril de la même année. Avec d’autres nostalgiques du Parti Démocratique (DP) qu’on préparait à relancer, je passais les fêtes du Nouvel An avec lui. Comble de l’histoire, ça fait 25 ans presque jour pour jour !
Et 16 ans après que je l’avais connu pour la première fois, l’Homme me fit les mêmes bonnes impressions de part sa sagesse, grandeur d’esprit, humour, générosité, sens de la liberté, de la démocratie et du pardon ainsi que le respect pour le droit de l’individu. C’est pour cela que j’acceptai d’être candidat du Parti Démocratique à Takamaka, aux élections législatives de 1998.
Pendant toutes ces années jusqu’il y a quelques jours, j’ai passé des moments privilégiés en présence de notre président fondateur. Je me souviendrai aussi de ses leçons de vie qui m’ont servi de formation civique, de ses nombreuses anecdotes et surtout de ses poèmes que souvent, j’eus le privilège d’en savourer la primeur.
Tout petit que je me sentais et faisais devant lui, il réussit par sa grande humilité, à rendre réciproques cette intimité et estime : Il m’appelait « Paddy » comme mes plus proches et du jour, reste la personne à m’avoir fait le plus beau compliment.
« Il a le profil d’un futur ministre de la Culture », écrit-il à mon égard dans une édition de ‘Seychelles Review’ en 1998.
Ce n’est pas moi qui l’ai dit, et je n’en aspire pour autant. Moi je dis plutôt que le plus grand ambassadeur de notre culture, ce fut Sir James Mancham lui-même.
Le Premier Président, le premier à non seulement travailler, mais aussi vivre à State House, y sera inhumé ce jeudi 12 janvier au cimetière se trouvant dans le jardin.
En toute reconnaissance, je dédie aussi un poème au Premier Président.
Premier Président
Cher Monsieur le Président
Je me prosterne humblement
Pour vous rendre ce dernier et modeste hommage
Dans la belle langue qui vous a été chère
Celle du beau pays qui vous a fait Chevalier d’honneur,
Comme l’Angleterre, vous a fait Sir.
Ainsi, en relisant de votre illustre existence les belles pages
Malgré de profonde tristesse mon pauvre cœur envahi
Il se permet de réjouir que ne fut que de grandes Premières, votre si belle vie.
Malgré les éloges et les gloires, de se rappeler
On n’aura jamais fini, que dans votre pays, vous avez toujours été… le Premier
Les Premières, on peut les chanter comme une belle chanson sans fin
La longue liste peut résonner à jamais comme un si long refrain
Et on n’aura jamais fini de toutes les rappeler, de toutes les citer…
Dirigeant de parti politique… Premier
Premier Député
Sir James… Premier
Premier Chef Ministre
Premier Premier Ministre
Premier Président
De notre pays indépendant.
Hélas, Premier Président renversé et exilé,
Mais parcours de l’histoire, de Dieu la volonté
Pour faire de vous Premier apôtre de la réconciliation,
Comme St. James premier prophète martyr,
Au pouvoir, vous osez humblement la renonciation
Pour ramener le pays bien aimé,
A la raison et à la paix
Pour libérer ton peuple de la peur.
Et on aura oublié, que vous étiez aussi Docteur
Si du monde vous l’avez été pour la coexistence pacifique des nations
Aux Seychelles, on vous doit la pacifique cohabitation
Dont savourent fièrement aujourd’hui
Ceux qui naguère malheureusement, ne vous ont pas compris.
Dans vos mémoires pour cette belle nation, sa postérité
De vos empreintes de grand poète et d’écrivain, vous aurez tout gravé.
Monsieur le Président
Le Premier de nos Présidents
Même dans votre éminente absence
Nous célébrerons encore plus fort, votre vie, votre puissance.
Car, quand nous vous accompagnons vers votre dernière demeure
Votre demeure de Premier Président, justice est faite à la dernière heure,
Rattrapée par la triste réalité d’hier.
Cette solennité, est encore une grande Première,
Signe vivant que vous ne serez jamais mort
Mais que toujours plus fort
Vous serez à jamais, le Premier.
Et ce grand pays que vous avez dignement bâti,
Que vous avez pourtant dit, trop petit pour être de division maudit
Ne sera jamais le dernier.
Car, pour reprendre votre plus belle citation
Dans votre plus ambitieuse des visions
« Nous ne voulons pas de Bamako
Nous voulons de Monaco ! »
Au revoir Monsieur le Président
Le premier des Présidents.
Michel Paddy Savy, 9 janvier 2017